sexta-feira, 17 de maio de 2013

Pensar Nove Décadas de Amizade (nº 60): Sylviane Sambor*


Sylviane Sambor com Eduardo Lourenço, Bordéus, Maio de 2002.


Merci, du fond du cœur, Professeur Lourenço !

Comment évoquer avec des mots justes Eduardo Lourenço, et dire combien il a marqué et transformé au fil des 25 dernières années la Française que je suis, qui était tellement ignorante du Portugal lorsque la chance m’a fait croiser sa route ?
Comment exprimer l’affection mêlée d’admiration, le ravissement toujours renouvelé - la tendresse même - qu’il suscite en moi depuis notre première rencontre.
C’était, je crois, à la Closerie des Lilas à Paris en novembre 1988 à l’occasion des Belles Etrangères Portugal : rêveur ou distrait, Eduardo avait oublié l’invitation du CNL et avait déjà dîné… Tandis que, gourmand, il se (re)mettait à table, je découvrais ce soir-là le formidable «professeur Tournesol», curieux de tout et de tous, poète de la langue et des idées, qui m’est souvent apparu, ensuite, comme un chasseur – non pas de papillons, encore que… ! – mais de fulgurantes associations et de lumineuses constructions intellectuelles.
Avec cette manière quasi orientale de tourner autour de l’idée pour mieux la saisir et l’envelopper, il nous offre généreusement la sensation d’accéder vraiment à l’intelligence sensible, à l’intelligence supérieure ; et nous en sortons grandis.
D’autres, plus compétents que moi, loueront les différentes facettes de son œuvre considérable. Pour ma part, je souhaite avant tout et surtout retenir le poète qui sut, par exemple, mieux que nombre d’autres écrivains majeurs avant lui, traduire en quelques mots le génie et la radicale modernité de Montaigne : « Si Montaigne ne savait pas qui il était, et si, pour le savoir, il s’est mis à écrire, il savait qu’il était »*. [Montaigne ou la vie écrite, L’Escampette, 1992 & 2004.]
Longue serait la liste des souvenirs et des émotions qu’il faudrait encore convoquer : telle sa première rencontre avec Antonio Lobo Antunes dans une bibliothèque de Bordeaux en mai 2002 qui m’avait transportée de bonheur ; ou ces jours passés à Vence, avec Claude, mon compagnon créateur des éditions L’Escampette, au milieu de l’indescriptible capharnaüm qu’était son bureau…
Merci enfin pour cette autre part de l’immense dette que j’ai envers lui, puisque je lui dois de m’avoir révélé pourquoi je me sens si profondément européenne.



*Sylviane Sambor. Directrice du Centre du livre et de la lecture en Poitou-Charentes.

Texto inédito getilmente enviado pela Autora para Ler Eduardo Lourenço.